Par Nathalie McSween, coordonnatrice du Fonds Solidarité Sud

Le Fonds Solidarité Sud a fait des sauts qualitatifs majeurs dans les deux dernières années, tant au plan de notre soutien à des projets au Sud qu’au plan de notre vie associative.

La santé financière de notre organisation étant très bonne, nous avons pu accroître les montants dédiés aux projets du Sud et nous engager auprès d’eux sur une durée plus longue (3 à 5 ans). L’arrivée de nouvelles expertises dans le réseau du Fonds (agronomie, énergies vertes, finance solidaire) a donné lieu à la création d’équipes « Sud » (Pérou et Sénégal) et à la signature d’une entente de collaboration avec UPA DI dans le cadre de son programme de coopération volontaire, programme qui a permis jusqu’à présent à huit personnes du Fonds de mettre à contribution leur expertise dans le cadre de missions terrain auprès de nos partenaires du Sud. La présentation de notre rendez-vous annuel en mode hybride et la création de nouveaux comités de travail (information, recherche et développement) ont par ailleurs beaucoup enrichi notre vie associative tout en nous permettant d’améliorer nos communications et de développer de nouveaux partenariats structurants au Québec et au Sud.

Nous avons de quoi être fiers et fières! L’évolution récente du Fonds Solidarité Sud est en effet à la hauteur de l’ambition qu’avait le conseil d’administration du Fonds lors de l’élaboration de notre plan stratégique 2021-2025.

Nous sommes en bonne santé financière et en route vers notre cible

Notre fonds de dotation est maintenant de plus d’un million $ et ce, grâce à des donateurs et donatrices généreux et généreuses, mais surtout très fidèles – la plupart donnent chaque année et le montant de leurs dons tendent généralement à augmenter après quelques années. Au Fonds, nous avons de grands donateurs et de grandes donatrices (2 000 $ et plus), de moyens donateurs (250 $ et plus) et aussi plusieurs personnes qui sont membres du « Club des 100 $ ». Outre les dons annuels, le Fonds peut aussi s’appuyer sur des engagements de legs testamentaire (nous avons d’ailleurs reçu un important legs testamentaire à la fin de l’année 2020) et sur un portefeuille de 10 polices d’assurance-vie dont le Fonds est propriétaire et bénéficiaire, ce qui représente un capital différé estimé à un million de dollars. Ce capital différé est très important pour nous permettre d’assurer la pérennité du Fonds. Malgré un peu plus de 2 millions $ en épargne (actuelle et différée) pour le développement du Sud, le Fonds demeure encore une petite fondation. Pour pouvoir nous comparer à d’autres fondations et augmenter significativement notre impact au Sud, le conseil d’administration vise à moyen terme une capitalisation de 4 à 5 millions $. Nous n’y sommes pas encore, mais nous sommes sur la bonne voie!

Développé pendant dix ans uniquement sur la base du travail bénévole des membres de son conseil d’administration, le Fonds Solidarité Sud a enfin eu les moyens en 2021 de se doter d’une ressource humaine pour assurer la coordination de ses activités. D’abord à deux jours/semaine en 2021 et 2022, puis à quatre jours/semaines à partir de la mi-2023. Dans la vie des fondations, il s’agit toujours d’une étape à franchir pour se permettre collectivement d’aller plus loin.

Nos outils de communication se sont améliorés

Dans les deux dernières années, avec l’arrivée d’une ressource humaine à la coordination du Fonds, nous avons été en mesure de travailler au développement d’un nouveau site internet, de professionnaliser notre infolettre qui paraît maintenant deux fois par année. Depuis lors, les visites sur notre site web sont passées du simple au triple et le nombre d’abonnés de notre infolettre est passé de 700 à 1500. Il nous reste maintenant à poursuivre sur cette lancée tout en mettant aussi quelques efforts pour améliorer l’alimentation de nos pages Facebook et LinkedIn.

La pandémie nous a par ailleurs permis de développer une nouvelle approche en ce qui concerne nos rendez-vous annuels. Ceux-ci se tiennent maintenant en mode hybride (en personne et en visioconférence). Comme le Fonds est maintenant présent dans neuf régions du Québec, cela nous permet de rejoindre nos membres et sympathisants là où ils sont tout en favorisant des rencontres face-à-face afin de permettre l’échange.

Notre vie associative s’est enrichie

Nos militants, sympathisants et donateurs sont en très grande majorité des personnes retraitées qui combinent les deux éléments suivants : 1) elles ont été engagées socialement dans leur vie personnelle et professionnelle et désirent, par leurs dons en argent et en temps, poursuivre cet engagement pendant leur retraite et au-delà ; 2) elles croient au « monde qui se refait », à la force du collectif (coopératives, groupements de femmes et de jeunes, organisations paysannes, finance solidaire) face aux défis du monde contemporains ou du « monde qui se défait ». Ces deux éléments alimentent notre fonds de dotation, mais alimentent aussi les comités qui constituent notre vie associative. Dans les deux dernières années, de nouveaux militants se sont ajoutés aux militants de la première heure et ont enrichi son capital de savoirs et d’expertise.   

Les comités de travail qui ont été créés et investis par les militants dans les deux dernières années :

  • Notre comité Recherche et développement est une « anomalie » dans le monde des fondations et des organismes de coopération internationale qui vont rarement au-delà de ce que requièrent les demandes de subvention. Dans notre cas, ce comité a servi à lancer les discussions sur la question de l’accès à l’énergie en milieu rural et agricole en Afrique de l’Ouest dans un contexte où il s’agissait d’un point aveugle dans les orientations des OCI du Québec, y compris chez nos partenaires UPA DI et SOCODEVI. Dans le cas du Pérou, c’est sur la question de l’accès au crédit que travaille l’équipe.
  • Notre comité Information a été créé dans la foulée de la refonte de notre site web et de notre infolettre afin d’adapter nos outils de communication pour qu’ils répondent encore mieux aux besoins d’information de nos militants/militantes et de nos donateurs/donatrices.
  • Nos équipes Sud ont été créées afin d’appuyer la co-construction de nos projets en collaboration avec UPA DI et la Caisse d’économie solidaire Desjardins. Ces équipes ont souvent été en relation étroite avec le comité Recherche et développement. C’est dans le cadre des réflexions de ces équipes Sud qu’a été évoquée la pertinence de mettre à contribution les expertises des militants/militantes du Fonds dans le cadre d’une entente de collaboration avec le programme de coopération volontaire d’UPA DI et ce sont souvent des membres de ces Équipes Sud qui ont participé à des missions de volontaires dans le cadre de cette entente signée en 2022 et valide jusqu’en 2026.

Nous avons renforcé les partenariats existants et en avons développé de nouveaux

Depuis nos tout débuts, peut-être parce que nous étions une toute petite fondation, mais peut-être aussi en raison du parcours des personnes qui constituent notre base militante, nous avons toujours cru à la force des partenariats, à l’addition de nos forces plutôt qu’à la compétition des uns à côté des autres. Au Québec comme ailleurs, les OCI ont fini par accepter comme étant un phénomène inéluctable qu’être en compétition avec d’autres OCI pour du financement public était « normal ». Loin de nous l’idée de blâmer qui que ce soit : il s’agit souvent d’une question de survie organisationnelle pour les OCI, surtout lors d’un cycle de compressions budgétaires comme celui de l’ère Harper au milieu des années 2010.

Le Fonds Solidarité Sud est une fondation dotée d’un fonds de dotation pouvant compter sur ses fonds propres. N’ayant pas de volonté d’agir directement sur le terrain, nous avons d’emblée cherché à additionner nos forces à celles d’autres organismes de coopération internationale ayant des approches similaires (particulièrement SOCODEVI et UPA DI), c’est-à-dire soutenir des organisations ancrées dans les communautés comme les coopératives, les organisations de producteurs et de productrices agricoles et les groupements de femmes, de jeunes, etc. qui existent parce que leurs membres s’y investissent. Au Fonds Solidarité Sud, nous cherchons aussi à additionner nos forces avec des organisations québécoises qui ont des approches similaires à la nôtre au Québec – la Caisse d’économie solidaires Desjardins en est un bon exemple – et avec des institutions québécoise de recherche appliquée qui ont une expertise ciblée pouvant être mise à contribution pour les projets que nous désirons soutenir au Sud – le Centre TERRE du Cégep de Jonquière en est un bon exemple.

Cette volonté d‘additionner nos forces se traduit aussi dans notre engagement d’abord dans la création du FISIQ (notre président, Louis Favreau, en a été un des architectes) puis dans son déploiement au Québec et auprès des partenaires du Sud. Les deux projets en co-construction sur lesquels travaille le Fonds en collaboration avec UPA DI et la Caisse d’économie solidaire Desjardins ont ainsi eu le FISIQ en ligne de mire dès le début des discussions.

Nous avons adopté une approche plus structurante dans notre appui aux partenaires du Sud

La volonté exprimée par le conseil d’administration lors de l’adoption du Plan stratégique 2021-2025 était que notre approche d’appui aux projets du Sud soit plus structurante, notamment en s’engageant à appuyer les partenaires à moyen et long terme et en misant prioritairement sur le renforcement des économies de proximité dans la perspective de la nécessaire transition socio-écologique. À cet égard aussi, nous pouvons être fiers et fières.

Pour nous, l’agriculture familiale est un maillon économique stratégique

Cela étant dit, la plupart des experts et des intervenants engagés comme nous sur le terrain de l’économie et de l’écologie s’entendent pour dire que l’agriculture familiale dans la plupart des pays du Sud est le maillon stratégique, car c’est l’assise économique principale de sociétés à forte dominante rurale. Cependant, ces communautés rurales sont privées d’activités agricoles suffisamment génératrices de revenus (et de l’emploi qui vient avec) parce que privées d’accès au crédit, d’accès à l’électricité et d’accès à l’eau. La mise à contribution d’une finance solidaire à la bonne hauteur et, en bout de ligne, le développement d’assises économiques locales adossées à un plan d’action pour une transition sociale-écologique occupent donc aujourd’hui une partie centrale de l’équation d’avenir.

Économie et énergie circulaire verte au Sénégal

Au Sénégal, dans le cadre du projet Économie et énergie circulaire verte porté par notre partenaire UPA DI dans la région de Diourbel au Sénégal, l’appui du Fonds Solidarité Sud concerne spécifiquement les volets Accès à l’énergie et Accès au crédit du projet. Notre appui sur 5 ans (2022-2026) permettra au partenaire du Sud, l’Union régionale des associations paysannes de Diourbel (URAPD), de développer des activités génératrices de revenus à partir de l’énergie verte. Ce projet développé en mode co-construction avec UPA DI, la Caisse d’économie solidaire Desjardins et le Centre TERRE du Cégep de Jonquière pendant près de deux ans, reflète aussi la volonté du conseil d’administration du Fonds de miser sur l’effet levier dans notre appui aux projets du Sud. Si le Fonds Solidarité Sud s’est engagé à soutenir ce projet sur 5 ans, c’est notamment parce que UPA DI s’est engagé à le soutenir à partir de sa levée de fonds sur au moins trois ans (2022-2025). Un des résultats de notre engagement conjoint autour de ce projet est le développement d’un Programme d’investissements pour les énergies vertes au Sénégal par le Fonds d’investissement solidaire international du Québec (FISIQ). Nous nous attendons à ce que le premier groupe à déposer une demande de prêt dans le cadre de ce programme soit notre partenaire du Sénégal, l’URAPD.

Ce projet témoigne aussi de la force de mobilisation du Fonds Solidarité en ce qui concerne des expertises précises. Plusieurs militants du Fonds se sont en effet engagés à mettre leur expertise à contribution dans le cadre de ce projet. C’est le cas d’Alain Roy, agronome et membre du conseil d’administration du Fonds qui, grâce à l’entente de collaboration entre le Fonds et le programme de coopération volontaire d’UPA DI, a réalisé deux missions terrain au Sénégal pour le démarrage de ce projet, en compagnie d’André Beaudoin, un autre membre du CA du Fonds, pour la première mission, et de Gildas Tapsoba du Centre TERRE du Cégep de Jonquière pour la deuxième mission. Alain a par ailleurs déjà réalisé deux missions à distance en appui à l’URAPD et en réalise une troisième actuellement.
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Réseau des groupes d’économie solidaire dans le nord-est du Pérou

Au Pérou, nous en sommes encore au début d’un partenariat avec le Réseau régional de groupes d’économie solidaire du nord est (RED de los GIESS Nor Oriente del Peru) engagés dans le développement d’économies de proximité. Ce projet, développé en mode co-construction avec UPA DI et la Caisse d’économie solidaire Desjardins pendant près de deux ans, reflète la volonté du conseil d’administration du Fonds de miser sur le renforcement de l’accès au crédit de nos partenaires du Sud.

Le Fonds s’est engagé auprès de la RED pour une durée de cinq ans, avec un engagement financier de 30 000$ sur trois ans qui est appuyé par un engagement financier de 40 000$ sur deux ans d’UPA DI. Lire plus

Projet Résilience : améliorer l’accès à l’assurance agricole pour les agricultrices au Sénégal

Au Sénégal aussi, dans le cadre de l’appui au projet Résilience porté par notre partenaire SOCODEVI dans quatre régions du Sud du pays, notre contribution de 30 000$ sur trois ans (2022-2024) permettra d’améliorer l’assurabilité de 150 groupements féminins représentant 7000 femmes. Dans le contexte d’un projet de grande envergure (10,3 millions $) financé par des fonds publics canadiens, la contribution du Fonds permet de répondre à un besoin ciblé qui n’était pas prévu dans le projet initial, mais qui a été identifié par SOCODEVI sur le terrain, soit le besoin de réduire les risques en amont en développant un guide de bonnes pratiques agricoles (pratiques climato-intelligentes) basé sur des savoirs locaux et destiné aux femmes agricultrices afin de leur permettre d’améliorer leurs rendements mais aussi les aider à réduire les risques et ainsi pouvoir bénéficier des assurances-récoltes. Lire plus

En guise de conclusion

La guerre en Ukraine a été pour plusieurs un révélateur des fragilités du système d’approvisionnement (en engrais, en céréales, en pétrole) de nombreux pays africains. De cette fragilité a résulté un accroissement rapide et inquiétant de l’insécurité alimentaire dans plusieurs pays. Cette fragilisation des communautés fait partie des contraintes avec lesquelles nos actions doivent composer, mais cela renforce aussi la vision collective qui nous anime au Fonds : miser sur l’énergie verte durable pour accroître l’autonomie énergétique des communautés et sur l’économie sociale et solidaire afin d’accroître la résilience des communautés.

Ce n’est pas parce que nous sommes encore une petite fondation que nous n’avons pas de grandes ambitions! Nous avons beaucoup de cartes en main : un réseau de militants et de militantes engagés pour assurer la pérennité du Fonds et appuyer les projets que nous choisissons de soutenir dans la durée; un réseau de donateurs et de donatrices fidèles qui est aussi un réseau d’ambassadeurs et d’ambassadrices qui ont le potentiel d’aider le Fonds à atteindre ses objectifs de croissance et; des partenariats structurants avec des organisations du Québec qui sont prêts à mettre leur expertise et leur argent à contribution pour faire avancer notre cause commune : mettre l’économie sociale, la finance solidaire et la transition écologique au cœur de notre solidarité avec les pays du Sud.