La directrice de Sen’Finances au Sénégal s’adresse aux participants du Rendez-vous du 21 septembre dernier.

Ce qu’il faut savoir

  • Nathalie McSween est coordonnatrice du Fonds Solidarité Sud depuis 2020, mais y est impliquée depuis sa création, à la fois comme donatrice et comme animatrice de l’équipe du Fonds en Outaouais, une région où elle a aussi dirigé pendant plusieurs années une Table de concertation régionale sur la faim regroupant plus de 50 organisations. Détentrice d’un doctorat en sciences sociales appliquées et d’une maîtrise en développement régional, elle a étudié les mouvements paysans et le développement économique local au Sénégal, au Ghana et au Burkina Faso. Dans son ancien métier d’infirmière, elle a par ailleurs travaillé en Bolivie, en Albanie et en Suisse.
  • Le projet pilote Économie et énergie circulaire verte (E2CV) en cours de réalisation dans la région de Diourbel au Sénégal est le résultat d’un travail de co-construction sur deux ans entre UPA DI, le Fonds Solidarité Sud, la Caisse d’économie solidaire Desjardins et le Centre TERRE du Cégep de Jonquière.
  • Le Fonds s’est engagé à soutenir les volets Énergie verte et Accès au crédit de ce projet mis en œuvre par UPA DI pour une durée de cinq ans (2022-2026) à raison de 20 000$ par an (sous forme de don et de garantie de prêt), soit un montant total de 100 000$ et aussi à mobiliser les expertises de son réseau pour appuyer les partenaires du Sénégal par le biais du programme de coopération volontaire d’UPA DI.
  • C’est le travail de co-construction entourant ce projet qui a été la bougie d’allumage du Programme d’investissements pour l’énergie verte au Sénégal, un partenariat entre le Fonds d’investissement solidaire international du Québec (FISIQ) et la Fondation Sen’Finances qui aboutira en novembre 2023 à la signature d’une entente d’une valeur de 500 000$.

Nathalie McSween raconte

D’abord, j’aimerais rappeler quelque chose de fondamental : partout dans le monde, l’accès à l’énergie et l’accès au crédit sont des leviers cruciaux pour le développement rural. Ça a été vrai au Québec dans notre histoire. Entre 1930 à 1960 au Québec, nous sommes passés de moins de 10% d’électrification rurale à 95%[1]. Et ce, grâce à la nationalisation de l’électricité par l’État bien sûr, mais aussi parce que le syndicalisme agricole a poussé fort pour amener l’électricité dans les campagnes; parce qu’il y a eu la création de coopératives d’électricité, parce que les familles rurales ont eu accès au crédit pour accéder à l’énergie. Ce qui a été vrai chez nous, l’est aussi ailleurs. Les contextes changent bien sûr, mais les fondamentaux restent.

Le projet Économie et énergie circulaire verte est en cours de mise en œuvre dans le village de Mbokhadane situé dans la région de Diourbel au Sénégal, une zone aride caractérisée par un élevage de transhumance, c’est-à-dire que les éleveurs doivent se déplacer pendant l’année pour faire paître leurs troupeaux. Il s’agit d’un projet inspiré de l’expérience d’UPA DI qui a mis en place en Haïti des cantines scolaires sur la base d’un modèle d’économie circulaire qui crée un débouché pour des produits locaux, ainsi que des emplois rémunérés pour les cuisinières en plus d’offrir des repas nutritifs à des écoliers et écolières.

En ce qui concerne le projet au Sénégal, nous nous sommes inspirés de l’expérience en Haïti, tout en y ajoutant un volet Accès à l’énergie verte et un volet Accès au crédit dans la foulée d’une démarche de co-construction entre le Fonds Solidarité Sud, UPA DI, la Caisse d’économie solidaire Desjardins et le Centre TERRE du Cégep de Jonquière qui s’est échelonnée sur deux ans. Le projet est mis en œuvre par l’Union régionale des associations paysannes de Diourbel (URAPD) en partenariat avec le Conseil national de coopération et de concertation des ruraux du Sénégal (CNCR).

Des nouvelles de la mise en œuvre du projet

  • Le volet cantine scolaire du projet a débuté en janvier 2023 : deux fois par semaine 450 écoliers et écolières bénéficient ainsi d’un repas sain et nutritif préparé par des femmes du village rémunérées pour leur travail et fait à base de produits locaux en grande partie achetés des familles agricoles de ces mêmes écoliers et écolières.
  • Le volet Énergie verte a débuté en octobre 2023 : des panneaux solaires – financés à part égales par le Fonds Solidarité Sud et UPA DI – ont été installés sur les toits de chacun des trois bâtiments du complexe scolaire de Mbokhadane (les 2 bâtiments de l’école primaire plus la case des tout-petits), qui n’étaient pas du tout électrifiés.
  • Le volet Accès au crédit est amorcé et prendra son envol bientôt. Des plans d’affaires sont en cours de rédaction par l’URAPD pour le dépôt de demandes de prêt dans le cadre du Programme d’investissements pour l’énergie verte au Sénégal issu d’un tout nouveau partenariat entre le FISIQ et la Fondation Sen’Finances. Une des demandes de prêt qui sera déposé par l’URAPD dans le cadre de programme est un projet d’embouche bovine rapide qui permettrait à la fois de créer des revenus supplémentaires pour des exploitations familiales du village de Mbokhadane, mais aussi d’alimenter en intrants un biodigesteur qui serait utilisé pour la cuisson des repas de la cantine. La cuisson des repas étant actuellement réalisée à l’aide de gaz butane, ce projet permettrait à la fois de réduire les émissions de gaz à effet de serre et de réduire les coûts de la cantine scolaire.

La contribution de l’expertise québécoise à la mise en place de ce projet

Une des grandes fiertés du Fonds Solidarité Sud en ce qui concerne ce projet est la richesse des partenariats qui se sont développées entre des organisations du Québec (Fonds Solidarité Sud, UPA DI, Caisse d’économie solidaire Desjardins, Centre TERRE du Cégep de Jonquière, FISIQ) et du Sénégal (URAPD, CNCR, Sen’Finances), ainsi que l’engagement de plusieurs personnes qui font partie du réseau élargi du Fonds qui ont accepté de mettre à contribution leur expertise pour faire avancer ce projet si inspirant.

C’est le cas d’Alain Roy, agroéonomiste retraité du MAPAQ et militant du Fonds Solidarité Sud de la région de l’Estrie, qui a réalisé deux missions d’appui au Sénégal en 2021 et 2022 et en est à sa troisième mission d’appui à distance, dont une est en cours.

C’est aussi le cas de Gildas Tapsoba, ingénieur et chercheur en énergie renouvelable au Centre TERRE du Cégep de Jonquière qui a réalisé une mission au Sénégal en 2022 et produit un avis technique qui a permis de planifier les besoins en énergie afin de lancer les activités du projet.

C’est le cas de Josée Poirier Defoy, présidente du Regroupement des cuisines collectives du Québec qui a réalisé une mission au Sénégal en 2022 afin d’accompagner l’élaboration du menu de la cantine par le groupe de cuisinières.

C’est le cas aussi de Ndeye Sine, professeur de sociologie au Cegep de l’Outaouais et spécialiste de la microfinance au Sénégal (elle en fait sa thèse de doctorat) qui a réalisé une première mission en 2023 et en réalisera une autre en 2024, afin d’appuyer le déploiement du Programme d’investissements pour l’énergie verte au Sénégal par Sen’Finances.

Pour en savoir plus

[1] Pour en savoir plus : Dorion, M.-J. (2000). « L’électrification du monde rural québécois », Revue d’histoire de l’Amérique française, vol. 54, no 1, p.3-37. Lire

Visionnez l’enregistrement de la présentation de Nathalie McSween lors du Rendez-vous du 21 septembre 2023. Visionner

Visionnez l’intervention de Fatoumata Ndour, administratrice générale de Sen’Finances lors du Rendez-vous du 21 septembre 2023. Visionner